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Poudreuse et panoramas grandioses non loin des pistes Courses à skis au sud des Dolomites

La traversée des Dolomites n' est plus une expédition depuis longtemps. Les infrastructures s' y sont développées de manière fulgurante, tant cette curiosité naturelle est unique en son genre. A défaut d' être joli, ce n' en est pas moins pratique. Grâce aux tire-fesses et autres remontées mécaniques, il est aisé pour le randonneur de passer d' un massif à l' autre et de gagner nombre de sommets skiables ou de se laisser séduire par une nature restée étonnamment intacte. La voiture peut rester à la maison.

De Bolzano, capitale du Tyrol du Sud, la terrasse d' altitude de Siusi et de Castel-rotto est à un jet de pierre en bus. Le massif du Sciliar, emblème de l' alpage de l' Alpe di Siusi et accessible en télécabine, se dresse au-dessus des jolis villages du Tyrol du Sud. Durant les week-ends ensoleillés, on voit défiler sur cet alpage, qui peut être considéré, avec ses 50 kilomètres carré, comme le plus grand d' Europe, outre les adeptes du ski de piste, du ski de fond et de la randonnée hivernale, les amateurs de calèches tirées par des chevaux. Si l'on emprunte le chemin qui mène au Sassopiatto, on a tôt fait de se retrouver seul. Tel un récif corallien, le pilier d' angle du massif du Sassolungo se cabre au-dessus des pentes douces de l' Alpe di Siusi. On peut dire qu' il fait de l' effet. La dalle inclinée de la zone sommitale est parfois exposée à de forts vents et, du même coup, la neige y est soufflée et glacée. Par conditions favorables toutefois, une descente fantastique y attend le skieur. On n' oubliera pas la vue impressionnante dont on y jouit, qui s' étend jusqu' à l' Ortler à l' ouest et qu' à la Pala au sud.

Après la descente, la Tirler Hütte vous invite à faire une halte et à vous réconcilier avec le tintamarre des pistes. La statue de Luis Trenker, coiffée de neige, a le sourire, comme si cet homme de bronze ne pouvait contenir sa joie à la vue des décolletés que de belles italiennes exhibent volontiers sur la terrasse de la cabane, à l' abri du vent. Quelques-unes n' hésitent pas à placer une feuille d' aluminium sous le menton afin de rendre leur visage encore plus croustillant.

Du pâturage de l' Alpe di Siusi, on profite d' une descente facile dans le Val Gardena, avant d' atteindre le Passo Sella à l' aide d' un remonte-pente. Là-bas, c' est au Rifugio Friedrich-August, au Col Rodela, que l'on sera le mieux pour passer la nuit, choyés autant du point de vue culinaire que paysager. La vue sur Sella et le massif du Sassolungo est impressionnante, en particulier aux premières lueurs du jour, lorsque les premiers rayons du soleil habillent les bastions rocheux d' un manteau rose. Il peut faire chaud durant la montée qui mène à la Forcella Sassolungo ( brèche ), mais en contrepartie, le Circo del Sassolungo ( cirque ) reste à l' ombre, conservant ainsi la neige poudreuse. La descente raide qui suit est légendaire et se termine confortablement sur les pistes qui conduisent dans le Val Gardena.

Au lieu de monter jusqu' à la Forcella Sassolungo, il est possible de gagner le Passo Pordoi depuis le Passo Sella par les pistes. De là, le Piz Boè, dans le massif de la Sella, est un sommet facile d' accès. De la station supérieure située sur le Sas Pordoi, l' ascension ne dure qu' une heure et demie. En revanche, les descentes y sont exigeantes. L' itinéraire à travers le Val de Mesdi en direction de Colfosco, sur l' îlot linguistique d' Alta Badia où l'on parle le ladin, un dialecte romanche, offre un décor particulièrement spectaculaire. Même la descente, quoique plus courte, par la Forcella Pordoi jusqu' à la station inférieure du téléphérique n' est pas à sous-estimer. Vue d' en, elle semble anodine. Vue d' en, elle devient extrêmement raide et étroite. Il s' agit donc de bien prendre son souffle avant de faire le grand saut. Les skis luttent dans la neige cartonnée. Après quelques sauts gourmands en énergie en toute concentration à travers le passage le plus étroit, le terrain s' ouvre enfin. Les lattes s' enfoncent dans de la neige poudreuse, moelleuse comme de la ouate. La neige vole en scintillant dans l' air froid et limpide. Le cœur s' agite, tant il déborde de joie.

Gagner la Marmolada avec les remontées mécaniques depuis le Passo Pordoi ne pose aucun problème et les randonneurs à skis y trouvent également leur compte. Même si la fusion de douze stations, qui a donné naissance à « Dolomiti Super-ski », le plus grand domaine skiable des Alpes, avec 1220 kilomètres de pistes et 460 installations de remontées mécaniques, l' infrastructure concernée se concentre en particulier autour de centres touristiques comme Cortina d' Ampezzo, Alta Badia ou Val di Fiemme. A côté de cela, il reste encore suffisamment de place pour des zones sauvages et, du même coup, une multitude de courses à skis.

La Marmolada, située dans la province de Belluno, est considérée comme la reine sans couronne des Dolomites. La rudesse de sa face sud, qui forme un décrochement de 800 mètres de haut plongeant dans la Valle Ombretta, contraste avec la douceur de sa face nord, qui porte le plus grand glacier des Dolomites et qui rend possible des courses à skis jusqu' en juin. La descente à skis mène les skieurs sur douze kilomètres de la Punta Rocca à Malga Ciapela. Là, le mieux est de poursuivre son chemin à travers la gorge de Serrai, une fente étroite, longue de deux kilomètres dans le rocher vertical d' où s' écoulent de nombreuses chutes d' eau gelées. A la sortie, on tombe sur Sottoguda, un petit village de contes de fées. Il est possible de continuer un autre jour sur le flanc sud de la Marmolada et de gagner le Rifugio Fuciade, dans la province de Trente, en passant par la Valle di Franzedas et de poursuivre encore, après quelques courses, en direction du Passo Rolle.

Le paysage autour du Passo Rolle est très intéressant, même si cela ne saute pas aux yeux immédiatement à la vue des nombreuses remontées mécaniques. L' ouverture de la route du col vers 1875 a tôt déjà contribué à l' avènement du tourisme à San Martino di Castrozza et provoqué, au fil du temps, un boom dans la construction de complexes touristiques. Si l'on veut fuir le tintamarre de l' après et si l'on préfère le calme des hauteurs, il faut se rabattre sur le Passo di Lusia, les cabanes du massif de la Pala étant fermées en hiver.

Le Rifugio Lusia, situé un peu au-dessous du sommet du col, offre, outre une vue imprenable sur le massif de la Pala, qui se détache telle une forteresse des denses forêts du Paneveggio, un cachet des plus romantiques. Dans le salon douillet aux murs décorés de vieux skis, le feu crépite dans la cheminée.

Le Monte Mulaz, aux côtés duquel se dresse le massif déchiqueté du Focobon, compte parmi les plus beaux buts d' excursion en bordure nord de la Pala. Nous partons tôt et empruntons d' abord la piste, avant de plonger dans l' ambiance romantique de la forêt sauvage du parc naturel du Paneveggio. Ci et là, un chevreuil timide émerge des énormes épicéas, nous fixe du regard l' espace de quelques secondes, avant de disparaître dans le sous-bois à la vitesse de l' éclair. Le bois de grande valeur de l' épicéa chenillé qui pousse ici a été utilisé autrefois pour la fabrication des fameux violons « Stradivarius ». Cette essence est aujourd'hui protégée. Un itinéraire en pente douce nous mène ensuite du Val di Venegiotta à la Malga Venegiotta. Nous quittons peu après la petite route carrossable et amorçons la montée en direction du sud-ouest. Nous gagnons ensuite le Passo Mulaz après avoir traversé un petit cirque rocheux. Un peu au-dessous trône le Rifugio Mulaz, seul et fermé. L' arête sud, large au début, est de plus en plus abrupte, rendant bientôt impossible une progression skis aux pieds. Nous déposons nos lattes et grimpons sur l' arête assez exposée par endroits, avant d' atteindre la partie sommitale et ses petits clochers. De là, le panorama est enivrant. La Cima di Focobon exhibe ses à-pics orientés au nord-ouest, qui semblent à portée de main. En bas, la vallée est noyée dans une mer de brouillard. 

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