Face nord du Petit Combin, un joyau oublié (La -)
sage forcé »: l' écaillé tranchante choisit le point faible du pont neigeux que je domine de quelques mètres. Tout l' édifice cède et elle finit sa course au fond d' une crevasse. Devinez où sont nos deux héros... Assez mal en point, ils débutent plutôt mal la saison...
Petit retour en arrière
En Juillet 1997, je me rends dans le val de Bagnes, au-dessus de la cabane Brunet. Je suis en quête de lacs de montagne et ils sont nombreux dans la région. J' y découvre aussi un trésor insoupçonné: la face nord du Petit Combin. Repartant vers la vallée, je fais halte à la cabane, afin d' y glaner quelques renseignements: « Elle se fait encore cette face nordNon, on préfère gravir les arêtes », me répond le gardien. Plus tard, parlant de mon projet, mes compagnons me répéteront: « Mais, elle se des-
Pour l' alpiniste, le skieur et le randonneur Le Grand Combin: le roi dans son royaume
cend à ski cette face. Tu veux y aller à ski ?» Réponse peu encourageante. Je suis pourtant persuadé qu' il y a là une face qui ne demande qu' à être explorée.
Le plaisir de l' obstacle surmonté
Juin 1998, Fred et moi quittons Bex au petit matin vers 4 h 3O. Je pensais tout d' abord bivouaquer non loin de la cabane Brunet, mais les orages de la veille m' en ont dissuadé. Un parcours difficile à travers un brouillard épais nous conduit à Pindin. Nous nous préparons. L' ambiance est lugubre. Soudain, dans la nuit qui prend fin, les nuages se déchirent au sud et nous laissent entrevoir l' objet de notre convoitise. Surgissant comme dans un rêve, la cime élégante du Petit Combin se dévoile. Notre enthousiasme se réveille. Six cents mètres de dénivellation nous attendent, une marche d' approche qui devrait freiner nos ardeurs...
Parvenu au pied de la face, je l' étudié. J' ai déjà gravi plusieurs faces glaciaires lisses et régulières, ou tourmentées, avec le même souci de sécurité: éviter autant que possible de s' exposer aux séracs, tenir un horaire, ne s' assurer qu' en cas de néces-
sité, contourner les difficultés, etc. Aujourd'hui, je nourris d' autres ambitions. Je ne perçois plus les difficultés comme auparavant et désire affronter les obstacles que recèle la paroi. Les éviter, ce serait remonter la grande pente de neige sur la gauche. J' y renonce d' entrée, car je sous-estime la partie centrale de la face. Celle-ci est plus variée et je crois entrevoir un passage. Naïvement, j' en suis même persuadé.
Assez vite, la pente augmente. Un premier ressaut passé, nous pénétrons lentement dans le château de glace. Tours, fossés aux rares passerelles, oubliettes et murs insurmontables se succèdent. Au milieu de cet enchevêtrement, deux silhouettes minuscules. Deux « fourmis » errant à la recherche d' une issue. Mais d' un labyrinthe, on ne sort jamais sans peine. Un mur d' une trentaine de mètres nous barre bientôt le passage.. " " .Vertical par endroits, il nous offre la plus belle longueur de la journée. Plus haut, tandis que je franchis un pont à genoux tant la neige est pourrie, je prends conscience des dimensions inquiétantes de la crevasse dont je cherche à atteindre l' autre bord. Ce trou semble n' attendre que ma visite. Une autre fois peut-être. Pourtant le monstre insiste, puisque l' écaillé tranchante qui nous a valu bien des frayeurs nous attend juste au-dessus...
Les difficultés augmentent, les incertitudes aussi
Jusqu' ici, notre itinéraire est presque rectiligne. Nous avons affronté les difficultés pour le seul plaisir de l' obstacle surmonté. Suite à ces belles longueurs, une zone beaucoup plus tourmentée nous occupe plus longuement. Devant nous, une crevasse énorme. La franchir impliquerait de faire un rappel qui nous déposerait sur un pont douteux. Je repère une alternative sur ma gauche. Le passage est certes étroit, mais nous n' avons pas le choix. Comme des funambules accrochés entre neige et lumière, nous errons momentanément sur les crêtes glacées.
Suivent d' autres moments d' incertitude. Nous ne savons toujours pas si quelques mètres plus haut une crevasse infranchissable nous barrera le passage. L' issue se trouve pourtant juste au-dessus de nous. Si nous atteignons les pentes terminales, lisses et sans difficultés, nous pourrons poursuivre sans peine jusqu' au sommet. Reste à traverser un champ de crevasses et de murs repoussants. Notre matériel encombrant ne nous permet pas des prouesses pour le saut en longueur. Faisant appel à notre intuition et à la chance, nous parvenons enfin
La fin des grosses difficultés est proche
au bas des dernières pentes. Nous nous arrêtons sur le bord d' un autre trou, afin de nous remettre de nos émotions.
Epilogue
Par l' arête nord-est, superbe ligne ourlée de corniches, nous atteignons le vaste plateau sommital sous les yeux du maître des lieux, le Grand Combin, plus somptueux que jamais. L' arête des Avagères, plus longue que difficile et offrant de jolis points de vue sur la face nord du Petit Combin, nous ramène au col de Lâne, d' où nous regagnons finalement Pindin.
Nous avons réalisé une course extraordinaire, faite de souvenirs uniques. Sans être d' une difficulté extrême, cette face offre des possibilités nombreuses et variées. Elle représente aussi un périple idéal pour aiguiser le sens de l' itinéraire. Elle m' aura finalement laissé un sentiment très fort: celui d' avoir marché à contre-courant ( la voie a été ouverte en 1957, par une descente à ski... ) et d' avoir parcouru une face délaissée. Aujourd'hui, chaque fois que je remonte la vallée du Rhône en direction de Martigny, la cime tronquée du Petit Combin m' apparaît. Le joyau brille encore, même s' il est oublié de certains...
Activités jeunesse
Itti vita dei giovani
Jugend-Infos,Berichte, i-Aktivitäten
Werner Munter, prend congé du groupe dans une tempête de neige. Le temps exécrable qui règne à la Konkordiaplatz contraste avec la clarté et la simplicité de la théorie des avalanches, expliquée par W. Munter au début du cours, aux futurs moniteurs et monitrices d' excursions à ski. Par ses dons d' orateur, il a su captiver son public; par la provocation, il a réussi à ébranler les certitudes les plus absolues. Il a plaidé pour le hasard ( le hasard est juste ), pour le risque ( qui est comme le sel dans la soupe: trop, ce n' est pas sain, trop peu, c' est fade ), ainsi que pour la réflexion ( mieux vaut réfléchir que peller ). Il s' est insurgé contre les expressions « garantie de sécurité » ( l' alpinisme est un sport à risques ) et « experts » ( l' avalanche ne reconnaît pas les experts ). Son enseignement, « avalanches 3x3 », et sa méthode de réduction des risques sont désormais bien établis dans la formation des chefs d' excursions à ski. Ils forment la base incontournable de toute course J+S, de la préparation jusqu' à la réalisation.
Evalin Berther, 26 ans Evalin est l' une des deux participantes et chef du groupe 2. Elle a 26 ans et habite à Rueras ( GR ). Depuis cette année, elle est gardienne de la cabane de Chelenalp, dans la région