A la découverte du paradis des minéraux Randonnées alpines dans le Binntal
Le Binntal n' a ni monts célèbres, ni glaciers sublimes, ni parois grandioses à proposer aux grimpeurs et autres alpinistes. En revanche, cette région spectaculaire fera le bonheur des randonneurs, que ce soit pour des courses longues et exigeantes ou pour des excursions faciles.
Le Binntal se distingue par une nature intacte. Les trois communes qui se partagent son territoire, à savoir Ernen, Grengiols et Binn, se sont associées pour créer le « Parc naturel Binntal ». Ce projet vise à préserver le patrimoine naturel et culturel tout en l' utilisant conformément aux principes du développement durable. Destiné notamment aux randonneurs, son programme prévoit des travaux d' entretien des sentiers sur les itinéraires les plus attrayants et des excursions guidées par des connaisseurs de la flore locale ou des chercheurs de cristaux. Il faut savoir que grâce à sa géologie très spéciale, la vallée recèle plus de 160 espèces de minéraux, dont une vingtaine sont uniques au monde.
L' accès à une région en transports publics fait partie du tourisme doux. Ainsi, depuis le lancement, en 2005, du projet « Alpentäler Bus/Bus alpin », le Binntal et le Lengtal sont desservis par des bus à la demande. En établissant son « camp de base » par exemple à Binn même, on peut faire appel à ces véhicules pour être très tôt à pied d' œuvre si l'on a prévu une longue randonnée.
L' ascension du Scherbadung figure dans cette catégorie. L' itinéraire qui mène au sommet de cette montagne n' est pas facile à trouver et tire un peu en longueur. Il traverse des zones géologiques très diverses. Tout scintillant, le sol reflète la richesse minéralogique du lieu et de la région. Sur les 700 premiers mètres de dénivellation, de Heiligkreuz à Obere Stafel, le chemin est balisé. Pour les 1100 mètres restants, le randonneur fera appel à son sens de l' orientation, malgré les quelques traces de sentier et cairns qu' il rencontrera, notamment entre Obere Stafel et le Fleschsee. Arrivé sur la butte qui précède ce lac de couleur sombre, il aura tout loisir d' admirer l' imposant cirque qui se déploie entre le Fleschhorn et le Wannihorn. Là, il aura avantage à mémoriser la suite du parcours. Empruntant un vague chemin sur une petite crête qui se hisse le long de la pente jusqu' à environ 2600 mètres, il obliquera vers l' est en passant au-dessus d' une dalle raide pour atteindre le P. 2756 près du Halbelfjoch, dont le nom ne figure pas sur la carte. En quelques mouvements d' escalade facile, il atteindra, au P. 2817, l' arête qui domine le col. Il la suivra en direction de l' est jusqu' à une vire donnant accès à la cuvette recouverte d' éboulis et de névés, située sur la droite. Il la gravira jusqu' à une brèche qui s' ouvre sur un plateau inattendu en un tel lieu. Continuant vers l' est par le P. 3022, l' itinéraire mène à une nouvelle zone d' éboulis dont la configuration est extrêmement complexe. Creux, replats, pentes et remparts rendent l' orientation difficile, même par temps clair, si bien que les traces et les cairns rencontrés sont des points de repère fort utiles. Un talus schisteux et terreux conduit à l' arête nord. Facile à escalader, comprenant quelques passages de degré II, elle permet d' atteindre le sommet, qui culmine à 3210 mètres. La longue ascension est récompensée par une vue magnifique sur les montagnes austères du Binntal et sur l' Alpe Dèvero du côté italien.
L' ascension du Gross Schinhorn donne un aperçu intéressant de la diversité du Binntal. Carrière de minéraux de Lengenbach, champs de linaigrettes, lacs alpins idylliques, dalles, zones d' éboulis et arêtes pointues sont autant de curiosités à découvrir. Le sommet de la montagne tarde à se dévoiler, mais tout à coup, on se surprend à poser le pied sur une cime très exposée d' où la vue est à la fois circulaire et vertigineuse. Au départ de Fäld, l' itinéraire s' élève en suivant des chemins jadis empruntés par les contrebandiers. Ce trafic clandestin florissant durant la guerre et jusque dans les années 1970 était la conséquence « naturelle » de la topographie du Binntal, qui compte pas moins de cinq passages vers l' Italie. Au Geisspfadsee, on quitte le sentier balisé pour obliquer à gauche et gravir une pente raide jusqu' au Mittelbergpass. Ici et là, d' anciennes excavations témoignent de l' activité exercée autrefois par les chercheurs de cristaux. Au col, où subsistent quelques résidus de glace et de névé, on peut déposer son sac à dos, puisqu' il ne reste plus qu' une vingtaine de minutes de montée. On escalade une pente d' éboulis parsemée de blocs de pierre pour atteindre l' arête qui mène au sommet, situé à 2939 mètres. Très exposé, il est constitué d' un enchevêtrement de gros rochers. Le randonneur qui ne veut pas faire le retour par le même chemin peut redescendre par le Hotäl. Depuis le Mittelbergpass, cet itinéraire, vaguement tracé par endroits et jalonné de quelques cairns, part vers l' ouest, passe par un petit plan d' eau anonyme et descend jusqu' à un véritable bijou de lac alpin, le Mässersee. Là, le parcours rejoint le sentier balisé qui mène à Binn en passant par Mässerchäller.
L' ascension du Helsenhorn depuis Heiligkreuz revêt un caractère nettement alpin. L' itinéraire suit d' abord le sentier du Ritterpass, balisé mais qui n' en comprend pas moins des passages exposés et des ravines glissantes. Au P. 2672, situé sur le dos d' une moraine, on quitte ce chemin pour monter à travers éboulis et rochers, via les P. 2853 et 2971, jusqu' au Helsegletscher, qui s' étend au pied du sommet. La traversée du glacier ne pose en principe pas de problème, mais il est préférable de se munir de crampons en présence de glace vive. Malgré son sol terreux et ses éboulis, la pente sommitale sud du Helsenhorn offre une bonne adhérence lorsque la température est relativement élevée, mais le risque de glissade augmente dangereusement en cas de gel. Dans un décor qui demeure sauvage de bout en bout, le randonneur sera impressionné par la profonde vallée de Chummibort, le tracé audacieux de l’itinéraire qui part à l’assaut du Ritterpass, les pics déchiquetés et inhospitaliers du Hillehorn qui se dressent derrière lui et la chaîne du Helsenhorn qui lui fait face. Dans la solitude de ces hauteurs, il aura plus de chances de rencontrer des bouquetins que de tomber sur d’autres excursionnistes. Une variante consiste à monter complètement au Ritterpass, puis de suivre le flanc nord de la Cima delle Piodelle jusqu’au Helsegletscher. En dépit de quelques cairns, cet itinéraire n’est toutefois pas facile à trouver.
Si le Binntal recèle encore d’autres courses exigeantes, telles que celles du Holzjihorn (T4) ou du Hohsandhorn (T5+), elle en propose également de plus faciles. L’Eggerhorn, beau sommet qui domine Binn, figure parmi elles (T2). Un autre parcours agréable mène de Binn à Ernen par les gorges de Twingi et Hockmatta (T1). Il emprunte les chemins muletiers historiques et l’ancienne route d’accès au Binntal, tronçon menacé par les avalanches en hiver. Mais en juin, on peut y découvrir les fleurs roses ou pourpres du violier du Valais. En Suisse, cette espèce croît uniquement dans le Haut- Valais.