Notices glaciologiques
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Notices glaciologiques

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J. P. Portmann, Neuchâtel

Aperçu historique I ( i88a-igoo«La variation périodique de longueur des glaciers est l' un des phénomènes les plus grandioses et les plus intéressants que nous montre le monde des Alpes » A. Forel ( 1882, P-251)2- I. INTRODUCTION A la suite d' une proposition d' Eugène Rambert en 1868, une collaboration pour l' étude des glaciers s' institua entre le Club alpin suisse et la Société helvétique des sciences naturelles. Un programme de recherches fut élaboré et une Commission glaciologique ( Gletscher Collegium ) nommée en 1 D' après les Rapports sur Les variations périodiques des glaciers des Alpes suisses I ( 1880 ) à XXI ( 1900 ) ( actuellement: Les variations des glaciers suisses ). Les Ier et IIe Rapports ont été publiés dans VEcho des Alpes ( XVII, Genève 1881 et XVIII, 1882 ); les suivants jusqu' en 1924, dans Y Annuaire du CAS, vol. XVIII et suivants, Berne dès 1883, puis dans la revue Les Alpes dès 1925.

2 L' annéeindiquée entre parenthèses correspond à celle du Rapport... et pas nécessairement à l' année de parution de celui- 18693. En firent partie, comme délégués de la Société helvétique des sciences naturelles, L. Dufour de Lausanne, E. Hagenbach de Bàie et A. Mousson de Zurich, alors que A. Escher von der Linth de Zurich, E. Rambert de Zurich et L. Rütimeyer de Bâle représentèrent le CAS. E. Desor de Neuchâtel fut appelé à la présidence.

En 1872, sur la proposition de la Commission glaciologique, l' Assemblée des délégués du CAS décida l' élaboration d' un Grand livre des glaciers suisses ainsi que la diffusion à' Instructions à l' usage des touristes du CAS parcourant les glaciers.

« L' origine de ces recherches sur les variations périodiques des glaciers remonte aux expertises faites à l' occasion du procès intercantonal plaidé devant le Tribunal fédéral, au sujet du niveau des eaux du Léman » ( Actes Soc.helv.sc. nat. 1912, p. 120 ).

De 1881 à nos jours, un Rapport sur Les variations périodiques des glaciers des Alpes a paru chaque année.

A. Forel5 de Morges, membre de la section des Diablerets, en fut le premier rédacteur et déploya, ainsi que dans d' autres domaines, une activité remarquable. De 1894 à 1896, il fut secondé par Léon DuPasquier6, de Neuchâtel; par la suite, Maurice Lugeon de Lausanne et E. Muret, de Morges, adjoint à l' inspecteur fédéral des forêts à Berne, lui prêtèrent leur concours pendant quelques années 7.

Ces Rapports furent réalisés grâce aux observa- 3 En 1893, cette commission fut remplacée par la Commission des glaciers de la Société helvétique des sciences naturelles ( Rütimeyer, 1881, p.405 ); cf. aussi Actes Soc.helv.sc.nat. 1869 ( 1870 ), pp. 139-142 et 1871 ( 1872 ), pp. 123-125.

Siegfried J.J., 1873: Das Gletscherbuch ( cf. Les Alpes, XVI, io, oct. 1938, p.459 ). Dübi, 1913, p.273. Jenny, 1938, P-459- 5 François-Alphonse Forel ( 1841-1912 ).

h Léon DuPasquier ( 1866-1897 ). Rapport... 1896, p.293; Bull. Soc.neuch.se.nat. 25, 1897,pp.3-62.

7 L. Mercanton, E. Argand, A. Renaud, P. Kasser, M. Aellen ont successivement poursuivi cette tâche jusqu' à nos jours.

tions que fournirent, en premier lieu, des membres du CAS et de la Société helvétique des sciences naturelles. Les inspecteurs forestiers, eux aussi, apportèrent très tôt leur collaboration, avec la participation active de Jean Coaz, inspecteur fédéral des forêts8.

En 1891, l' observation portait sur les glaciers suisses plus ceux du Mont Blanc, ainsi que sur le versant italien des glaciers valaisans et sur les glaciers de l' Engadine. Le territoire ainsi contrôlé comprenait la chaîne des Alpes centrales bordées à l' ouest par le Col du Bonhomme, à l' est par la Valteline, le Stelvio, les vallées du Haut-Adige, de Paznaun et Montafon.

L' étude méthodique des variations glaciaires, entreprise en Suisse, fut introduite dans d' autres régions. Les Clubs alpins allemand et autrichien instituèrent à leur tour un Conseil scientifique organisant les observations sur les glaciers et leurs variations. En France, le prince Roland Bonaparte et le géologue W. Kilian, de Grenoble, encouragèrent les recherches de ce genre. De son côté F. Virgilio de Turin avait entrepris dès 1883 des observations sur les glaciers ( 1891, p. 290 ).

Dans les premiers Rapports déjà, des informations furent données sur les fluctuations d' autres glaciers européens, voire asiatiques, arctiques, australiens ( 1882, 1883, 1892 ). En 1894, lors du VIe Congrès international de géologie, à Zurich, Forel fut chargé, par le comité du congrès, de développer une proposition de Marshall Hall, faite dans X Alpine Journal de 1891 ( 1891, p.290 ). Il s' agissait de créer une commission internationale pour l' étude, selon un plan d' ensemble, des variations en grandeur des glaciers du monde entier ( 1894, p. 270 ). F.A. Forel fut le premier président 8 La section Monte Rosa prit d' emblée à cœur l' étude des variations glaciaires ( 188g ). En 1892, les sections des Grisons firent de même ( 1892, p. 290 ). Au Valais, la collaboration des inspecteurs forestiers fut officielle à la suite de la décision du Conseil d' Etat du 16 février 1892. De son côté, le Département fédéral de l' industrie et de l' agriculture adressa aux cantons alpins une circulaire leur demandant d' organiser la surveillance des glaciers par leurs administrations forestières ( 1892, p.290 ).

- de cette nouvelle commission dont Léon DuPasquier fut le secrétaire.

II. ORGANISATION DES OBSERVATIONS Déjà dans les Instructions à l' usage des touristes du CAS parcourant les glaciers, il est recommandé, entre autres, de constater si un glacier est en progression ou en régression.

De son côté, dans son Ier Rapport ( 1880 ) F.A. Forel déplore l' absence d' observations systématiques et requiert la collaboration des amis des Alpes. Après avoir rappelé quelques généralités, il formule le programme envisagé et le mode d' ob, en précisant douze points à considérer9. Forel propose aussi des mesures, recommande la mise en place de repères, l' établissement de plans du front des différents glaciers et mentionne l' avantage qu' il y aurait à en prendre des photographies ( 1892, p.293; 1896, p.285)>°. Il demande encore que la position du front glaciaire soit mesurée dans le même mois de plusieurs années successives ( 1883, p. 302 ). Par la suite, il fut recommandé de faire deux mesures annuelles d' un glacier en décrue: l' une dans l' arrière, l' autre au premier printemps afin de saisir d' éventuelles fluctuations saisonnières ( 1884 ).

Forel fut amené à soulever le problème fondamental du dessin cartographique des glaciers, dont le relief est justement inconstant ( 1899, p. 203 ). Faut-il représenter l' état intermédiaire, moyen, considéré comme l' état normal ( 1886, p. 220 ), ou doit-on tenir compte soit de l' état minimal, soit au contraire du maximum histo- » Ordre de variations des glaciers; durée des périodes d' avance ou de recul; rôle de l' orientation, de la topographie et des moraines superficielles; variations de volume; variations dans la grandeur, l' épaisseur et le volume des névés; influence des facteurs météorologiques, etc. ( 1880; voir aussi 1882, p.252 en note ).

10 Forel fait allusion au plan du front du Glacier du Rhône de Ch.Dufour et A. Forel ( 1870 ) ainsi qu' aux croquis établis par les inspecteurs forestiers bernois ( 1900, p. 184 ) et d' au collaborateurs ( 1897 ).

.87 rique indiqué en général par les moraines terminales? Après avoir présenté d' autres possibilités encore ainsi que leurs inconvénients, Forel préconise que chaque glacier soit représenté dans ses deux dimensions extrêmes, opposées, en indiquant le maximum extrême par un pointillé bleu ( 1899, p. 207V1.

Tout le programme d' étude s' affina par l' obser de l' enneigement ( 1885, p. 359 ), et par la tentative de préciser l' altitude de la « ligne de neige » ( 1899, p. 216 ). Pour cela, il s' agissait d' ob les différences topographiques, au-dessus et au-dessous de la limite des neiges persistantes, surtout en appréciant, année après année, l' accessibi de certains sommets ( 1900, p. 173 ).

Comprenant donc l' importance de l' enneige qu' il désire étudier systématiquement, Forel propose l' emploi d' échelles graduées ou nivomètres ( 1890, p. 352 ). Il soulève à ce propos la question du choix du zéro de ces échelles et énumère quatre catégories de variations qu' on peut escompter: variations de courte ou de longue périodicité, variations accidentelles ou saisonnières.

Cet aspect particulier de l' enneigement sera abordé par Léon DuPasquier ( 1896 ) qui fait allusion à différentes méthodes pour déterminer la limite des neiges persistantesI2. L' intérêt des variations d' altitude de la ligne de neige... et leurs relations d' enchaînement avec les variations des glaciers sera confirmé tout spécialement par Maurice Lugeon au cours de ses levés géologiques sur les deux versants du Wildstrubel ( 1899, p. 216 ). Ce coauteur des Rapports reconnaît l' importance de l' épaisseur des neiges dans les cirques d' alimen. Des circulaires, adressées alors aux membres du CAS invitent les alpinistes à relever notamment la persistance de vieilles neiges et leur 11 Pour le Valais, la révision, entre 1871 et 1880, des cartes levées de 1839 à i860 par le Service topographique fédéral fournit des indications très précises sur la réduction des glaciers de cette région, réduction de 54 kilomètres carrés environ ( 1882, p. 262 ).

12 Méthode cartographique; méthode de Kurowski in Penck' s geogr. Abhandlg. 5/1, 1891, pp. 119-160.

étendue approximative, ainsi que l' apparition de nouveaux pointements rocheux, la disparition des névés ( 1900, p. 174)I3.

III. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES Chaque Rapport présente, à côté de phénomènes particuliers comme, par exemple, la formation des trous à cryoconites14 ( 1899 ), un certain nombre de questions générales. De celles-ci se dégagèrent, au cours des années, des connaissances glaciologiques fondamentales.

Dans le Ier Rapport, Forel mentionne plusieurs lois considérées comme provisoires et déduites d' observations antérieures ( 1880, p. 29 ). Ces lois sont reprises succinctement dans le IVe Rapport, avec adjonction de deux nouvelles lois ( 1883 ).

Comme première hypothèse, Forel retient que le facteur déterminant, dans les variations de grandeur des glaciers, est la vitesse d' écoulement de la glace. L' ablation, elle, a une action très subordonnée, puisqu' elles est dépendante de la température, phénomène à variations annuelles ( 1880, p. 28; 1886, p. 222 ). Il avance, par la suite, que la vitesse d' écoulement dépend au premier chef de l' épaisseur du glacier ( 1881, p. 138 ). S' ap sur les mesures d' Agassiz au Glacier de l' Unteraar, Forel se rendit compte que les variations périodiques de la vitesse ont lieu dans le corps même du glacier et pas seulement dans l' ex de la langue ( 1884, p. 296)I5. Il constate en outre que les diverses dimensions d' un glacier varient dans un même sens et que, par conséquent, l' étude de l' une d' elles renseigne sur les autres ( 1883^.302 ). On constate tout d' abord un épaississement du névé puis du glacier, d' amont 13 Cf. Echo des Alpes, 1900, pp. 232-233.

14 Cryoconite: fine poussière éolienne déposée sur les glaciers, souvent concentrée au fond de petites dépressions.

15 Observations de A. Forel et Ch.Dufour, entre 1857« 1880, ainsi que de Ph. Gösset sur le Glacier du Rhône, de Venance Payot sur le Glacier des Bossons, d' Alphonse Favre sur celui de Chamonix ( Echo des Alpes 1875, p. 15; Arch. se. physiques, Genève, 1876, p. 393; 1881, p. 5, p. 448; 1895, p. 209 ).

en aval, enfin son élargissement et son allongement ( 1886 ).

A la théorie de l'«écoulement intermittent » du glacier, à la façon d' une avalanche, formulée par Richter de Craz, Forel oppose celle de l'«écoule-ment continu » ( 1896, p. 290 ). Il en veut pour preuve la persistance de l' écoulement dans les profils supérieurs du glacier, même en phase de décrue comme le démontrèrent brillamment les mensurations du Glacier du Rhône ( 1887, p. 259 ).

En 1885, une question fondamentale surgit: quelles sont les relations entre les fluctuations de la température de l' air et des chutes de pluie d' une part, avec les variations périodiques des glaciers d' autre part ( 1885 ). Si dans le Ier Rapport déjà, Forel s' était préoccupé des fluctuations climatiques enregistrées à l' Observatoire de Genève, c' était avant tout pour mettre en évidence une certaine périodicité dans les crues et décrues des glaciers ( 1880, p. 28 ). En revanche, dans le VIe Rapport, il recherche une corrélation entre ces différents phénomènes en tenant compte des résultats publiés par C. Lang en Autriche ( 1885 ). Deux années plus tard, il présente même longuement les travaux d' Ed. Richter et de C. Lang i6. Il en conclut que « les variations de dimensions des glaciers sont dues essentiellement à des variations dans le débit glaciaire », c'est-à-dire à des fluctuations dans l' épais du névé, dépendant donc des chutes de neige ( 1887, p. 259 ). « Toute crue du glacier doit être précédée d' une crue du névé » ( 1887, p. 258 ).

Dans le XVIIe Rapport, Forel précise encore: « Les variations périodiques de grandeur des glaciers sont dues à des variations d' ordre climatique: variations dans les chutes de neige qui alimentent les névés, variations dans la chaleur estivale qui détruit l' extrémité terminale des glaciers en la transformant en eau » ( 1896, p. 282 ). Avec raison, Forel se rend compte que l' étude de petits glaciers serait particulièrement instructive, puisque leurs réactions 16 Ed. Richter étudia spécialement les conditions météorologiques à Klagenfurt, de 1813 à 1878, alors que C. Lang s' intéressa « aux mesures de huit stations voisines des Alpes, des la fin du siècle dernier jusqu' à nosjours ».

sont immédiates, sans grand décalage dans le temps.

Tout ce problème des causes des variations est traité dans le XVe Rapport, celui de 1894, qui mentionne aussi quelques questions en suspens et quelques problèmes de terminologie. Un rappel historique des explications données par les précurseurs de la glaciologie montre la complexité de la question. Si le rôle de la fusion fut défendu par Agassiz, Grüner, Favre, de Saussure, le rôle prépondérant de l' alimentation fut avancé par Venetz, Hugi, Rendu. Forel, instruit par ses recherches approfondies sur le Léman, se rend compte de la complexité des phénomènes déterminés par le climat. Rappelant que les observations sur les fluctuations des glaciers faisaient apparaître une longue périodicité, il avance que la fusion ne peut expliquer que les variations de courte périodicité. Il retient, comme base de ses études théoriques, l' hypothèse que le rôle de l' ali, donc de l' enneigement, est primordial ( 1894; 1896, p. 290 ). En 1895, Forel revient sur la multiplicité des causes de la décrue selon le jeu des variations positives et négatives de l' alimentation du glacier par les névés et de la fusion en aval ( 1895, p. 252 ). Il montre fort pertinemment que ces deux causes sont décalées dans le temps; l' ali étant antérieure, remontant à un passé plus éloigné que la fusion qui, elle, est intervenue plus récemment, au cours des dernières années ( 1895, p. 251 ) ".

La question du comportement individuel des glaciers s' est posée à plusieurs reprises. En 1883, dans le IVe Rapport, Forel énonce plusieurs lois dont celle de « variation simultanée des glaciers voisins » l8. Il ajoute qu' il y aura lieu de déterminer si 17 Forel avance comme preuve de ce décalage chronologique le début individuel des crues et, au contraire, la simultanéité des décrues des différents glaciers. Il rappelle que la grande chaleur et la sécheresse de fete de 1893 ont entraîné une fonte généralisée des glaciers ( 1893 ).

18 Lois de longue périodicité, de généralité ( en 1818, tous les glaciers des Alpes avancent; en 1880, tous ou presque reculent ). Lois des exceptions ( glaciers en retard ou en avance ), de simultanéité, de variations de volume.

le groupement des glaciers a lieu par massifs de montagnes ou par vallées, par régions orologiques ou par bassins hydrographiques ( 1883, p. 301. Dix ans plus tard, la réponse s' impose avec évidence: « Les glaciers du même groupe géographique ont tendance à présenter les mêmes variations de grandeur » ( 1893le cas des glaciers jumeaux comme, par exemple, ceux d' Orny et de Trient est mentionné ( 1883 ). Confirmant une certaine individualité dans le comportement des glaciers, Forel parle de la sensibilité du glacier, de sa promptitude spécifique en relation avec le temps nécessaire à l' onde d' intu pour arriver dans la partie terminale de la langue ( 1896, p. 291 ). En résumé, on constate une réponse individuelle de chaque glacier selon la poussée, une accélération de sa vitesse d' écoule selon sa longueur, son inclinaison, son épaisseur, son volume ( 1893 ).

IV. LES VARIATIONS PERIODIQUES DES GLACIERS Année après année, dès 1880, les Rapports sur Les variations périodiques des glaciers des Alpes nous fournissent des indications sur plusieurs dizaines de glaciers, plus de trente en 1881, plus de nonante en 1900 ( 1900, p. 189 ). Ceux-ci sont classes par Bassin hydro logique, toujours selon le même ordre.

Le résultat primordial des observations organisées par F.A. Forel dès 1880 se dégage du XIVe Rapport: « Les glaciers des Alpes centrales et orientales ont été dans le troisième quart du siècle dans une phase de décrue générale, faisant suite à une phase de crue vers 1850. » Des 1875, la phase de crue de cette période de fin de siècle s' est développée successivement dans un certain nombre de glaciers, et, petit à petit, elle tend à se généraliser ( 1893, p. 242 ). Ces fluctuations generalesse constatent aussi sur « les glaciers de IIe ordre, c'est-à-dire sur les petites masses de neiges et de glaces ( sic ) appliquées sur le flanc des montagnes, qui ne descendent pas le fond des vallées » ( 1884, p. 285 ).

La crue générale dont le maximum eut lieu en 1818, 1820 ou 1825, fut suivie d' une décrue mal marquée. Puis apparut, tout d' abord d' une façon indécise, la crue de 1840, 1850, voire i860 ( 1882, p. 148 ). Dès ce maximum, une décrue générale, très claire, très intense, se manifesta de sorte que en 1870, tous les glaciers des Alpes sont en retrait. Dès 1875, une nouvelle crue commence dans la partie occidentale des Alpes ( 1884, p. 313; 1894)1«.

Au cours des trois périodes de i Boo à 1815, de 1830 à 1845 et de 1875 à 1885, la proportion relative des glaciers en allongement augmenta, alors que l' inverse se produisit durant les deux périodes de 1815 à 1830 et de 1845 à 187520.

Plusieurs tableaux, en général très complets, condensèrent les observations faites sur les variations des glaciers suisses. Ainsi, en 1884, parut un tableau indiquant l' époque la plus probable du minimum qui a terminé la période de déclin, et précédé la période de croissance ( 1884 ). En 1885, un tableau donne le nombre des glaciers en accroissement, en diminution ainsi que la proportion centésimale des glaciers en allongement ( 1885, p. 367 ). En 1899, c' est la valeure tie sens de la variation de 1897, 1898 et 1899, qui sont exprimés. Enfin en 1900, un tableau général résume l' ensemble des observations, en donnant par bassin et par canton, les glaciers en crue et en décrue. A ce moment-là, un glacier est en crue certaine, 61 sont en décrue certaine sur 82 glaciers observés ( 1900, p. 189 ).

Afin d' obtenir une vue d' ensemble sur les variations des glaciers suisses, Forel élabora quatre cartes qui furent présentées à la Société vaudoise des sciences naturelles le 2 mars 1891. Les glaciers en crue, toujours plus nombreux, y étaient mis en évidence en 1875, en 1880, 1885 et 1890 ( 1891 ). Ces cartes furent reproduites dans le Rapport de 1892. En 1897, une cinquième carte fut publiée 19 En 1893/1894, quelques glaciers des Alpes occidentales sont en décrue. En 1896, l' ablation qui n' avait jamais été aussi faible depuis 1883, avait suivi un enneigement extraordinaire ( 1896, p. 293 ). L' été de 1899 fut splendide aussi ( 1899 ).

20 Quant à la périodicité des variations pour les XVIIe et XVIIIe siècles, Forel se référa aux données de Richter ( 1891 ) et à celles de Bruckner ( 1890 ), alors professeur à Berne. Ce dernier distingua un cycle de 35 ans dans les variations des glaciers ( 1890 ).

dans le XVIIIe Rapport ( 1897 ). Celle-ci faisait apparaître les glaciers accusant la crue de la fin du XIXe siècle et qui se trouvaient, soit encore en crue ( représentés en rouge ), soit en décrue ( en noir ), constatée d' ailleurs dès 1893. Quant à la troisième catégorie, comprenant les glaciers en décrue continue depuis la moitié du XIXe siècle, ils étaient non teintés ( 1897 ).

A plusieurs reprises, F.A. Forel se préoccupa de la subdivision et de la désignation des différentes phases, tout en soulignant combien il est malaise de fixer le début d' une période ( prodrome de la crue, début de la période, phase de la crue établie ). Il établit la distinction entre une période semi-séculaire et une période multiséculaire: ainsi celle de l' époque glaciaire des temps quaternaires ( 1889, p. 455 ).

Les limites entre les périodes de crue et de décrue étant souvent arbitraires, il est évidemment difficile d' invidualiser un certain nombre de périodes. Après quelques essais, Forel admet finalement cinq périodes, en accord d' ailleurs avec celles identifiées par Heim 21, mais en avance sur celles-ci ( 1885, p. 369 ).

Signalons pour terminer que les variations de quelques glaciers furent suivies avec une attention particulière. Ainsi le Glacier du Rhône fut l' objet d' observations minutieuses de M. Held, chef du Bureau topographique fédéral. Le maximum de ce glacier se situe vers 1856, son recul de 1856 à 1880 avec un retrait minimum en 1891/1892 ( 1894, p. 272 ); on parla même d' une petite crue de 1890, 1891, 1892 ( 1895, p. 250 ). Une carte du Glacier du Rhône, à l' échelle de r: 5000 et accompagnée de profils, fut présentée par le CAS à l' Ex nationale de Genève, en 1896. Elle figurait le résumé des études faites sous les auspices et aux frais du CAS pendant les années 1874-1894 ( 1897 ). Les nombreux rapports de L. Rütimeyer 22 ainsi que l' ouvrage remarquable de 21 HeimA. Handbuch der Gletscherkunde ( Stuttgart 1885 ).

11 Jahrbuch des Schweizer Alpen-Club 1881, p.377; 1882, p.245; 1883/1884, p.326; 1884/1885, p.437; 1886/1887, p.209; 1887/1888, p.249; 1888/1889, p.375.

P. LsMercanton23 rappellentlesrecherches fondamentales faites sur ce glacier.

Parmi les autres glaciers dont les variations furent particulièrement bien étudiées, retenons le Glacier de Zigiorenove ( 1886, p. 241 242 ) et le Glacier de Grindelwald, pour lequel d' anciennes et de nombreuses indications sont fournies ( 1891, P-3°5)- D' autre part, le déplacement de VHôtel des Neu- châtelois fut suivi attentivement ( 1884, p. 296 ). En août 1899, la Conférence de la Commission internationale des glaciers s' y rendit et y constata encore la présence de 6 blocs. Entre 1842 et 1899, la vitesse moyenne fut de 70,9 mètres avec un ralentissement dès 1840.

Signalons encore qu' on profita des travaux de Joseph Vallot au Mont Blanc pour déposer sous le sommet, le 20 septembre 1891, une lame de plomb portant une inscription écrite à Morges le 29 août 1891 ( i8gi,p.299 ).

En guise de conclusion, nous pouvons nous référer au XXIe Rapport... ( 1900 ), on sont consignés les résultats essentiels des vingt premiers Rapports, résultats présentés devant la Société helvétique des sciences naturelles, à Thusis, le 3 septembre 1900 ( i goo, p. 169; Actes de la Société helvétique des sciences naturelles, Coire 1901 ).

Les variations des glaciers sont des changements de volume, non de forme; elles sont ou bien annuelles du fait de la fusion estivale, ou bien de période cyclique d' un tiers de siècle, pour certains glaciers, comme conséquence d' un excès antérieur d' alimentation des névés24. Le début de la crue, cyclique apparaît successivement dans les " Mercanton P.L. Mensurations au Glacier du Rhône, 1916.

24 Le Glacier du Rhône, entre autres, n' a présente que deux périodes, alors que d' autres dont le Glacier de l' Aar n' ont accuse qu' une seule période, au XIXe siècle.

La période d' un tiers de siècle correspondrait au cycle climatique de Brückner ( 1890 ).

En revanche, Forel déclara ne pas avoir constaté une périodicité de 11 ans dans les variations glaciaires ainsi que l' avait reconnue R. Wolf de Zurich dans la fréquence des taches solaires ( 1888, p.350 ).

divers glaciers. Le maximum, donc la fin de la crue, est dû à deux causes. Il s' agit, soit d' une ablation excessive et dans ce cas le maximum est général pour tous les glaciers ( exemple des années 1855 et 1892 ), soit de l' extinction de la poussée consécutive par arrêt de l' alimentation excédentaire. Dans ce deuxième cas, le maximum apparaît successivement pour les divers glaciers, comme par exemple entre 1818 et 1826.

Dans ce résumé des vingt premières années d' ob, Forel signale, entre autres, en tant qu' anomalies, l' apparition, dans certains glaciers, de crues rapides, pendant une année ou deux, au cours de très longues phases de décrue. Il les explique, à côté d' éventuelles erreurs d' observa, par la prédominance de l' écoulement sur le faible raccourcissement estival. Cela pourrait se produire dans les glaciers en état stationnaire, c'est-à-dire proches de l' état d' équilibre 25. Une autre explication serait l' arrivée tardive de la crue, peu avant une époque générale de minimum.

V. ÉVÉNEMENTS PARTICULIERS Des informations, plus ou moins étendues, sont données dans les Rapports au sujet de catastrophes survenues dans le monde alpin et souvent liées d' ailleurs au maximum glaciaire ( 1884, p.2g2 ): rupture et chute de masses de glace, vidange de lacs bordiers, inondations. Voici quelques-uns des événements sur lesquels des renseignements détaillés sont donnés dans les Rapports: 1882 Avalanche du Sex Rouge sur le Col du Pillon ( 1882, p. 255 ) 1887 Vidange du Lac de Märjelen. A nouveau en 1890 ( 1887, p. 266; 1888, p. 353; i8go)2ft 25 L' état de minimum représenterait la grandeur normale du glacier, alors que les crues, les poussées en avant, apparaî-traient comme des accidents.

26 La catastrophe de 1890 fit l' objet d' un rapport du Prince Roland Bonaparte. Arch, se, phys. et nat. XXIV. Genève 1890, p. 401.

1892 Inondation de Taesch ( 1892, p. 288 ) "

1894Inondations dans la vallée de Bagnes ( 1894, p. 2 74-photographies; 1899, 1900 ) 1895Glacier de Bis dans la région de Randa ( 1884, p. 292; 1895, p. 254 ) Glacier de l' Ai tels ( 1895, p. 259 ) 1899Crue dans la vallée de St-Nicolas ( 1888, p. 215 ). Crue de la Dranse ( 1899 ) Rupture d' une poche d' eau dans le Glacier deZmutt ( 1888, p. 216 ) 1900Glacier du Rhône ( 1900, p. 182 ) VI. BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE Sans autre indication, les références ci-dessous se rapportent à l' Annuaire du CAS ( Jahrbuch des Schweizer Alpen-Club ). Il s' agit d' articles relatifs aux variations des glaciers, au Glacier du Rhône, etc.

Blanc H. Le professeur Dr François Alphonse Forel ( 1841-1912 ). Actes delà Soc.helv.dessc.nat. 1912, pp. 110-148.

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