La montagne inspiratrice
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La montagne inspiratrice

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( un aspect musical du cervin ) par f. sing line

Avec 1 illustration ( 248 ) et une reproduction Quoique la littérature, la peinture, la photographie, le cinéma et la publicité aient vulgarisé à l' extrême l' image de cette prestigieuse montagne qu' est le Cervin, il n' en reste pas moins pour ses fervents admirateurs un émouvant motif de contemplation, un thème riche à susciter des réflexions philosophiques, voire même, chose nouvelle, des émotions descriptives transposées en un thème musical.

Nombreux sont les grands maîtres de la musique qu' inspira la nature \ mais, chose curieuse, c' est à un peintre, également violoniste il est vrai, qu' il fut donné d' évoquer, naïvement peut-être, mais quand même, d' évoquer le Cervin en tant qu' inspirateur de mélodie. En effet, Albert Gos qui, sa vie durant, visita chaque année Zermatt d' où il aimait à parcourir les alpages désertiques en quête de motifs pour ses tableaux, fut toujours attiré, envoûté même pourrait-on dire, par le Cervin pic altier s' il en est, il l' admira à toutes les heures du jour, par tous les temps et en peignit d' innombrables « portraits ».

Le peintre qui joignait toujours à son bagage professionnel son inséparable violon, l' accordait volontiers par quelques arpèges en doubles-cordes, lorsque, fatigué, il déposait palette et pinceaux, quittait son chevalet; et c' est face aux glaciers, souvent près de ce tranquille lac du Riffel, qu' il jouait son inspiration du moment, envolées mélodieuses, chant d' une âme enthousiaste, qui se perdaient dans l' immensité bleue du ciel alpestre... Cependant, si chacune des peintures d' Albert Gos possédait sa mélodie propre, le Cervin ne cessa de s' imposer à son double entendement, telle cette toile au titre musical de « Furioso » dans laquelle on voit le tourbillon des nuées d' orage 1 Les « Saisons » de Vivaldi ( quatre concertos pour violon ), le fameux « Clair de lune » de Beethoven, la « Truite » de Schubert, le « Sacre du Printemps » ( poème symphonique ) de Strawinsky, etc.

assaillir les arêtes acérées, les à-pics et les pentes de glace du grand mont solitaire. Ainsi, sans doute se concrétisa dans l' émotivité de fame du peintre cette si caractéristique description musicale du Cervin, dont le thème s' inspire de la structure même de la montagne, et la mélodie monte des lourds soubassements au faîte ultime de la cime élancée, allant d' un « largo da capo » à un « crescendo » final.

Il nous paraît intéressant de rappeler que c' est Emile Javelle, homme hautement cultivé, grand idéaliste et alpiniste de renom qui, en 1874, incita Albert Gos à se rendre à Zermatt où il se fit une joie de lui « présenter » le Cervin. Ce voyage, peut-on dire, marqua la carrière picturale de l' artiste surnommé le peintre du Cervin, tout comme en musique ce fut l' amitié d' Eugène Ysaïe - ce génial violoniste - qui développa en Gos ce puissant penchant musical. On peut se représenter ces heures d' émotion et d' enthousiasme vécues dans l' atelier, « où Javelle, dans une attitude méditative, écoutait chanter le violon d' Ysaïe ». Jeunes et fervents amis, qui à eux trois totalisaient à peine soixante-dix ans I. Influences subtiles mais constantes, elles développèrent de plus en plus chez l' artiste deux voies parallèles, musique et peinture se complétant l' une l' autre, enrichissement quotidien d' une longue vie ( 1852-1942 ).

De ses innombrables randonnées par monts, cols et vallées, A. Gos rapporta maintes mélodies alpestres, qu' il notait avec soin en traversant les villages où volontiers il s' arrêtait pour faire danser la jeunesse aux sons de son violon. C' est pour honorer sa mémoire que la commune de Salvan fit placer une plaque-souvenir sur un rocher des Marécottes, et que cette année même, une nouvelle rue de la ville de Genève porte le nom d' un artiste, membre d' honneur de la section Genevoise du CAS.

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